Slavkov ou Austerlitz?

La ville de Slavkov entra dans l’histoire à travers un conflit sanglant qui se déroula sur les champs en proximité le 2 décembre 1805. Elle est connue dans le monde entier excepté la République Tchèque comme “Austerlitz” éventuellement en russe “Avstierlitz”. Cette ambiguïté de deux noms – Slavkov – Austerlitz – rendit l’intelligence tchèque du 19e siècle (qui voulait atteindre l’indépendance de nation et résoudre aussi cette question d’équivalent allemand du nom tchèque) inquiète. Parmi eux il y avait le maire de Slavkov (1861 6 1876), linguiste amateur Jan Kolacek (1810 – 1894). Homme intelligent, cultivé, bachelier qui ne passa à l’université que par manque de l’argent. Après être élu le maire il ordonna le travail du bureau en langue tchèque, il fonda leur chronique municipale et il commença à étudier et classer systématiquement des actes des archives de ville. En travaillant il tomba sur un acte dans lequel il trouva un autre nom utilisé pour Slavkov et Austerlitz, donc le troisième nom : Novosedlice. Ce nom fut dans le temps déformé. De “Nouozedelitz” dans un acte latin de l’an 1270, la plus vieille mention de l’existence de Slavkov, à “Neusedlitz” dans un acte de 1370. Le rapport entre eux (Slavkov – Austerlitz – Novosedlice) resta pour lui inexplicable et pour cela il s’adressa à Frantisek Palacky, l’autorité de l’époque, l’auteur de l’Histoire de la nation tchèque en Bohême et en Moravie. Il reçut la réponse dans une lettre du 18 février 1864 de Prague avec une explication de Palacky :



Cher Monsieur,



La question que vous m’avez posée, pourquoi le nom “Navssedlicz” dans un acte allemand de 1416 changea-t-il en “Slavkov” dans un acte latin de 1422 appartient parmi les faits les plus obscurs de l’histoire des toponymes de Moravie. N’ayez pas peur, le vieux “Nausedlicz” aurait dû terriblement changer pour aboutir au nouveau Slavkov, le nom vie et fleurit même aux lèvres allemandes qui depuis des siècles transforment le son “Nausedlicz” en “Austerlitz”.



C’est un des vice que des Allemands avec leur culture introduisent dans notre pays. Je suis persuadé que déjà à partir de l’an 1361 (et aussi avant) le nom de la ville de Slavkov pour les habitants de la Bohême et de Moravie fut le Slavkov tandis que les Allemands l’appellent « Hausterlitz (Nausedlitz).



Je vous dois la preuve de mes mots. Prenez s’il vous plaît le dernier volume de mon “Histoire de la nation tchèque” où page 436 vous donna une note qui s’attache à l’an 1468 à l’appellation “Hostihradice”, pour les Allemands jusqu’à nos jours “Hosterlitz” (322), écrit aussi comme “Navserlitz” – une déformation semblable, n’est–ce pas ? Les anciens Allemands, connus par leurs déformations des noms propres, ont confus, semble–t-il, pendant XVe siècle déjà des appellations “nausedlicz” et “Hausterlitz” d’autant plus que les deux lieux étaient habités déjà sous le règne de Venceslas Ier de l’ordre des croisiers qui furent évincés de Novosedlice près de Slavkov et longtemps après aussi de Hostiradice.



Je suppose d’après des exemples analogues que “Novosedlice et Slavkov” étaient d’origine deux communes voisines, dans une d’elles des frères allemands régnaient, à l’autre il n’y avait que des Tchèques jusqu’au XIVe siècle quand les deux communes furent réunies. Les Allemands gardaient le nom Novosedlice, plus fréquent et plus ordinaire, mais ils l’ont transformé d’après Hostiradice en “Hausterlitz”, ce qui donne “Austerlitz” d’aujourd’hui.



Je ne m’est pas possible d’étudier ce cas plus profondément mais si vous voulez transmettre mes conclusions à un autre savant, archiviste du pays de Moravie Monsieur Brandl, j’ai l’espoir que lui aussi sera de même avis. Ce que Monsieur Volny écrit dans sa topographie de Moravie c’est très incorrect ; mieux valent ses pensées dans une œuvre postérieure “Kirchliche Topographie”, volume VI., p. 472. Veuillez l’étudier avec soin ou ce qui est toujours le meilleur et je l’ai fait, aller au sources de Bocek et dans des livres fonciers récemment publiés dans lesquels vous trouverez des donnés sûrs de l’histoire de Slavkov:



En 1243, le 20 mars pour la première fois témoigne “frater Ulricus commendator domus Teutonicorum in Nuzedlic”.



En 1243, le 30 avril le même témoigne mais le nom est transormé en « in Nuzedeliz” et en “de Navzedlice” et ainsi de suite Bocek III. 24, 25, 288.



En 1248, le 1er octobre le pape Innocent IV résout un procès des religieuses de Tisnov contre des frères allemands “de Novzelitz” et ainsi de suite Bocek III., 95



En 1285, le 29 juillet c’est “frater Perlachus commendator de Novo Sedlicz”qui témoigne et ainsi de suite Bocek IV, 297, 299



En 1294, le 30 avril dans des actes il y a deux témoins de l’ordre allemand ; “frater Andreas de Novosedlicz, frater Ulricus de Hosteradicz” et ainsi de suite Bocek V. 5.



En 1294, le 26 mai le roi Venceslas pour récompenser Dipold, père provincial de l’ordre allemand en Bohême et en Moravie, libère la petite ville Novosedlice (forum Novosedlicz) de l’administration du pays et la laisse à l’administration de l’ordre allemand, Bocek V. 2.3. p. 288.



En 1323, le 15 décembre à la demande d’un citoyen Vacslav (Venceslas) de Novosedlice (civis de Nausedlitz) des évêques d’Avignon accordent à l’église saint Jacques et à l’église sainte Vierge à Novosedlice des indulgences partielles. Bocek.



Cod. dipl. VI. 191. il paraît que Novosedlice et Slavkov forment déjà une ville bien peuplée.



En 1361, b. d. dans des livres fonciers “villa Pyrpaum vulgariter Hrusky prope Slavkov” est mentionnée (DZ Brn. p. 45 n 5). Il n’y a donc pas de doutes qu’à cette époque-là le nom Slavkov fut utilisé.



En 1370, le 25 novembre une vigne “in Neusedlicz” est inscrite en usage du couvent des Augustiniens de Brno. (DZ Brn. p ; 961 n 1).



En 1386 Jesek de Melnice vend “commendatori et ceteris cruciferis de domo Teutonica de Nausedlicz “de ses villages à Nizkovice (Neskovic) DZ Brn. p. 171 n 387).



Je ne puis pas continuer et je suppose que ce ne soit plus nécessaire. Tout ce qui est écrit ici servira bien de preuve que mon travail ne fut pas effectué à tout hasard.



Ce qui me semble important c’est la mention de l’église Saint-Jacques de l’an 1323 qui fut selon Monsieur Volny déjà détruite mais elle restait toujours dans la mémoire des habitants de Slavkov étant jadis l’église centrale. En ce qui concerne des autres donnés historiques de votre ville, vous vous en procurez facilement comme je l’espère. J’ai passé une journée à la recherche de tout ce que je vous envoie mais volontiers puisque cette recherche est très intéressante pour moi-même.



Je ressent une grande joie des nouvelles de la Moravie, mon cher pays d’origine, du mouvement qui mène vers l’indépendance nationale et des efforts qui tendent à l’éducation plus profonde. Dieu vous bénisse et protège votre voie du progresse, de civilisation, de l’industrie et du bien commun.



Je ne vous rends pas cette fois-ci vos deux actes de l’an 1416 et 1422 je le ferai dés que j’aurai la certitude de ne pas les faire perdre en route, quel dommage de ces documents.



Sinon avant la fin du mois de mai, alors je les prendrai sur moi à Brno où j’ai à me rendre et si mon ami respectable, prélat Napp voulait et pouvait, nous pourrions aller pour une autre fois à votre ville Slavkov.
Je vous prie, cher Monsieur, de me rassurer que vous aviez bien reçu cette lettre.
Veuillez agréer, cher Monsieur, mes salutations les plus distinguées.
Votre bien sincèrement dévoué
Dr. Frantisek Palacky



Aujourd’hui la lettre citée est disparue. Son texte est connu grâce à une copie qui est gardée dans les archives de la région de Vyskov qui réside à Slavkov sous sign. 681/177. Voici encore un texte y joint:



Copie d’après la lettre originale que Monsieur Jan Kolacek, le maire, offrit à la bibliothèque d’école où la lettre est déposée le 20 septembre 1876.



Matej Wodera,



maire



Note : Frantisek Palacky, né le 14 juin 1798 à Hodslavice en Moravie, à partir de l’an 1823 vécu à Prague où le 26 mai 1876, vendredi de l’Ascension à 4 : 30 est mort.



Matej Wodera, le 20 septembre 1876



Une deuxième copie de cette lettre de Palacky à Slavkov fit dans une chronique d’école avec le titre: “Hausprotokoll der Stadt Austerlitzer Trivialschule” Josef Mazanek, directeur et enseignant à l’époque. Il est bien probable que lui aussi se servait de l’original de la lettre même que son orthographe est un peu différente que celle de Matej Wodera. A part cela il y a des autres copies des années suivantes dans lesquelles il y a des changements et nous pouvons supposer qu’elles ne soient plus copiées d’après l’original. Surtout la copie du chroniqueur Rudolf Kyjovsky dans sa chronique de commune (l’an 1928, p. 6) et puis un autre – cette fois-ci avec beaucoup de fautes – du chroniqueur Jaroslav Jakes en 1962, p. 55 – 58.



Si nous ne connaissons la lettre de Palacky que d’après des copies, la réponse de Kolacek par contre nous pouvons étudier son original. Le 22 février déjà elle fut apportée à la poste de Slavkov et le lendemain elle arriva au bureau de poste à Prague. Aujourd’hui cette lettre fait partie de la succession de Frantisek Palacky aux archives du Musée de littérature nationale à Prague et docteur Jiri Koralka qui étudie systématiquement des écrits de Palacky fut si aimable et me prêta sa photocopie.



Sur l’enveloppe il y a cette adresse :
Cher Respectable Monsieur
Monsieur
Frantisek Docteur Palacky
Député du Conseil impérial. De la Chambre haute
Prague (Prag)



et un cachet “Recomandirt”. Au verso il y a des cachets du bureau de poste de Slavkov et de Prague : “Austerlitz 22/2”, “Prag23/2 11. F.”.



Le texte de Kolacek dans la réponse pour Palacky :



Respectable Monsieur,



Jamais je ne pourrai me revancher de Votre bonté et Votre aimable explication que Vous m’avez envoyée dans Votre gentille lettre du 18 du mois courant. Veuillez agréer, cher Monsieur mes remerciements les plus cordiaux de Votre bienfait. Après avoir lu Votre respectable lettre j’éprouvais de la honte de mes insuffisances de chroniqueur de l’histoire locale. Je réfléchissais autant d’où cet “Austerlitz” puisse venir et il ne m’est jamais fait penser que c’est un “Nausedlitz” déformé et maintenant je sait que cela se tient bien sur ses pieds comme vous me l’aviez bien montré. De même je n’aurais jamais pensé que Slavkov et Neusedlitz étaient jadis deux communes différentes et je vois maintenant que cela devait être comme cela et que Votre idée est juste et sûre. Proche de la ville de Slavkov, voire liée étroitement avec elle, il y a une rue d’hôpital qui forme son faubourg. Cette rue de 66 maisons est autonome, elle a son cadastre à elle, sa propre église Saint Jean-Baptiste et ici on votait jusqu’à 1848 sa municipalité, ce n’est que dès lors qu’ils sont centralisés en ville de Slavkov à son administration et comme cette rue est très ancienne il y a hors de doute qu’il s’agit d’un deux jumeaux que Vous mentionnez dans Votre aimable lettre et dont le nom s’explique dans la construction postérieure d’un hôpital.



Je ne suppose pas que Monsieur Brandl puisse me donner une explication plus convainquante que la vôtre dans Votre gentille lettre dont nous, moi et mes concitoyens, vous serions très reconnaissants et nous la garderons comme cher objet d’histoire pour nos descendants dans nos archives municipales.



Respectable Monsieur, la fin de Votre aimable lettre nous a fait plaisir comme vous y promettez de nous rendre visite au mois de mai. Veuillez, s’il vous plaît, tenir sa parole et avec Monsieur Prélat venez nous voir, nous nous réjouissons déjà à l’idée de vous accueillir.



Je n’ai aucune crainte pour des documents que je vous ai envoyés car ils sont bien chez vous j’en suis persuadé.



Je suis avec respect, Respectable Monsieur, votre humble et obéissant serviteur.



J. Kolacek



Frantisek Palacky, que nous sachons, ne visita jamais Slavkov. Des habitants de la ville néanmoins gardaient longtemps la connaissance de son attribution à l’explication des origines et du développement du nom de leur ville. La grande place de Slavkov fut à l’an du centenaire de sanaissance (1898) appelée la place Palacky pour rendre hommage au grand personnage de notre histoire culturelle et de politique nationale. La place portait son nom à travers des temps durs et des temps beaux jusqu’à nos jours.