Il y a 200 ans 160 000 soldats de deux armées se sont battus entre Brno et Austerlitz. L’armée française, la Grande Armée forte d’environ 75 000 hommes, sous le commandement de l’Empereur des Français Napoléon Ier, et l’armée coalisée austro-russe, forte de 85 000 hommes, commandée par le général Kutuzov en présence du Tsar Alexandre Ier et de l’Empereur d’Autriche François Ier.
Les causes de la guerre? Surtout le conflit de pouvoir entre l’Angleterre et la France, l‘inquiétude autrichienne de l’influence croissante française en Italie et l’aspiration russe de participer plus considérablement sur la politique européenne. La Grande Bretagne, menacée par l’armée d’invasion française concentrée sur les côtes de l’Océan, a formé assez facilement déjŕ la 3e coalition anti-française, et a donc déployé dans les arričres de l’armée d’invasion un enemi puissant. L’armée autrichienne occupe la Bavičre, l‘allié de la France. Napoléon doit tourner son armée vers l’Est, marcher vers le Danube. Il détruit l’armée autrichienne du général Mack ŕ Ulm, poursuit les Russes le long du Danube, occupe Vienne et continue vers la Moravie. Des renforts considérables russes arrivent. Les lignes de communication de la Grande Armée sont trčs étendues, les corps d’armée sont dispersés et fatigués. Il n’est pas étonnant que le jeune Tsar Alexandre et sa suite commencent se sentir assez forts pour prendre l’initiative et attaquer les Français. Napoléon joue son rôle de l’inquiet, il veut qu’ils se décident ŕ la bataille générale. Napoléon en a besoin, il doit vaincre les austro-russes rapidement et terminer cette campagne, jusqu’ŕ maintenant trčs réussie, mais qui l’avait amené trop loin de Paris. Il ne faut pas oublier la Prusse, pręte ŕ couper la ligne de retraite de la Grande Armée en cas d’un moindre échec français. L’armée coalisée part impatiemment d’Olmütz vers Brünn. Napoléon respire profondément et donne des ordres pour appeler les corps d’armée de Vienne et d‘Iglau. Il a déjŕ choisit et étudié le champ de bataille ou il déploie son armée de façon que les austro-russes attaquent son aile droite. Il leur offre une belle position – les Hauteurs de Pratzen. Les coalisés ne résistent pas ŕ la tentation, changent leur plan initial de tourner la gauche de la Grande Armée par le nord. Renversent l’ordre de leurs colonnes et marchent plus au sud.
L’armée française déployée vers l’Est tient la ligne de Bosenitz – Girzikowitz – Puntowitz – Kobelnitz – Sokolnitz – Telnitz. Le gros de la Grande Armée est concentré au centre et sur l’aile gauche. L’armée coalisée occupe les Hauteurs de Pratzen vidées par les Français. Elle est formée de cinq colonnes dont quatre devraient attaquer l’aile droite française entre Telnitz et Kobelnitz, percer les lignes de la Grande Armée, déborder le centre et la gauche de Napoléon en lui coupant la ligne de retraite. La 5e colonne (de cavalerie) et l’avant-garde du price Bagration devraient marcher contre la gauche française le long de la route d’Olmütz. La garde impériale russe est en réserve. L’état réel de l’armée austro-russe n’est pas bon. L’enthousiasme et l’assurance ne manquent pas. Ce qui manque c’est la communication, coordination et vue d’ensemble de la situation. Les unités sont arrivées dans leurs positions de départ la nuit derničre, les états-majors sont désorintés, les colonnes confondues. Le matin tout ceci cause des délais inévitables ce qui permet ŕ l’Empereur des Français de suivre, au moins partiellement, son plan offensif.
Les coalisés sousestiment la force réelle de la Grande Armée. Il ne pensent pas qu’elle aille plus que 50 000 hommes. Le plan de Napoléon c’est occuper par son centre et sa gauche les Hauteurs de Pratzen au moment ou les Russes les vident et sont engagés sur le Goldbach. La droite française devrait ętre renforcée par le corps du maréchal Davout qui marche depuis trois jours de Vienne. Les corps des maréchaux Soult et Lannes et la cavalerie de réserve de Murat, et avec eux les réserves de la Grande Armée, tomberaient des Hauteurs de Pratzen dans le flanc droit des austro-russes, Davout attaquerait leur flanc gauche.
La bataille commence avant la levée du Soleil prčs de Telnitz. L’avant-garde autrichienne de feld-maréchal-lieutenant Kienmayer attaque une partie de la division Legrand qui tient ce village. Les trois colonnes russes de l’aile gauche entrent le combat entre Telnitz et Sokolnitz, mal coordonées et rencontrant une forte résistence sur un terrain favorable ŕ la défensive. Les troupes du général Legrand sont bientôt renforcées par les régiments du IIIe corps d‘armée amenés par le maréchal Davout, le plus habile des maréchaux de Napoléon. Davout arręte les Russes dans la valée du Goldbach… L’Empereur voit les Hauteurs de Pratzen vidées, il commande ŕ son centre et ŕ son aile gauche en avant. Mais la gauche, les maréchaux Lannes et Murat, rencontre l’avant-garde russe du général prince Bagration, la cavalerie de réserve coalisée du prince Liechtenstein, et prčs du village de Blazowitz aussi des unités de la garde impériale russe. Les divisions Saint-Hilaire et Vandamme du corps du maréchal Soult continuent leur marche vers le sommet de la coline de Pratzen et vers Stare Vinohrady. Mais męme eux ils devront se battre contre un enemi imprévu. Derričre l’horizon la 4e colonne coalisée se prépare pour sa marche vers Kobelnitz. Un combat trčs dur est engagé le long de tout le front des deux armées ce qui ne répond du tout aux plans dressés avant la bataille. Ce sont le Français qui commencent ŕ gagner le dessus. Soult force la 4e colonne ŕ se retirer des Hauteurs de Pratzen, les réserves de Napoléon écartent la derničre tentative des Russes de regagner l’initiative et męme la garde impériale russe doit battre ŕ la retraite. Bagration et Liechtenstein se retirent suivis lentement par Lannes et Murat. Le centre coalisé est rompu. Napoléon peut revenir ŕ son plan initial. Il tourne son centre vers le sud-ouest et attaque les arričres de la gauche coalisée qui est tenue toujours par le maréchal Davout sur le Goldbach.
Le résultat est net. Si Bagration, Liechtenstein, la garde du Tsar et la 4e colonne se retirent en ordre relatif vers Austerlitz et sur la route de Göding, la gauche de l’armée austro-russe est détruite. Toute la 3e colonne est enveloppée et met bas les armes. Le reste des Russe s’enfuit en plein désordre le long des deux grands étangs vers le sud-est. Napoléon est maître du champ de bataille. L’Autriche accepte l’armistice séparée dans quatre jours et la Paix de Presbourg change considérablement la carte politique de l’Europe, la France est devenue la premičre puissance européenne et Napoléon a pu commencé ŕ construire son Grand Empire. L’armée d’Alexandre est rentré en Russie, mais la paix entre la France et la Russie ne sera pas signée qu’aprčs la bataille de Friedland en 1807.
Notre bataille de samedi le 3 décembre, comme celle de 1805, commence par l’attaque de l’avant-garde de Kienmayer contre le village de Telnitz…
Męme sur notre champ de bataille il y aura le village de Telnitz, il y aura la faisanderie de Sokolnitz et les Hauteurs de Pratzen. La Grande Armée est divisée en aile droite, centre et cavalerie de réserve. L’aile droite défendera la ligne de Telnitz et Sokolnitz. L’armée coalisée attaquera par son aile gauche et videra partiellement les Hauters de Pratzen. Le centre français exécutera sa Saute de Lion (30 minutes aprčs le début de la bataille), attaquera la 4e colonne, qu’il forcera ŕ quitter le champ de bataille (dans 45 minutes de combat) et se tournera vers les arričres de la gauche coalisée ce qui décidera la bataille. Entretemps les cavaleries de réserve des deux armées se chargeront et contre-chargeront dans le secteur nord du champ de bataille.
L’armée française sera déployée sous le Santon et le long de la route de Tvarozna (notre Goldbach). L’aile droite tiendra la ligne de Telnitz-Sokolnitz, on ne pourra pas voir le centre de l’armée couvert derričre la crčte; comme on ne l’aurait pas vu en 1805 ŕ cause du brouillard. Les austro-russes se préparent ŕ marcher vers Telnitz et Sokolnitz. La majorité des soldats est en capotes grises ou brunes. Généralement on peut dire que, dans l’infanterie et l’artillerie, les Français sont bleus, les Russes sont verts et les Autrichiens sont blancs (mais l’artillerie autrichienne porte habit brun). La cavalerie des deux côtés porte de diverses couleurs. A notre bataille d’aujoud’hui ils participent aussi des reconstitueurs portant des uniformes des autres nationalités encore. On a invité des groupes de reconstitution de l’armée anglaise, bavaroise, polonaise, prusse, saxone, italienne… Pareillement on peut rencontrer les Autrichiens ou les Russes ŕ Waterloo.
La reconstitution moderne ce n’est pas ni théâtre, ni jeu de guerre. C’est au mi-chemin entre les deux. Il peut arriver que la bataille n’aura pas suivi nos plans ŕ 100%. Les deux armées ont leurs commandants en chef, leus états-majors généraux, commandants subalternes. Les ordres sont transmis par les aides de camp montés. Il faut respecter de strictes rčgles de sécurité, c’est pourquoi on ne verra pas le feu de prčs, les charges ŕ la baďonette deviennent, dans leur deničre phase, plutôt des bousculades amicales. La cavalerie charge trčs prudemment. Mais l’essentiel y reste – la défense de l’aile droite française sur le Goldbach, l’attaque de la gauche coalisée, l’arrivée de Davout, la Saute de Lion de Soult, les combats de cavalerie, la défaite du centre coalisé et l’attaque décisive dans les arričres de la gauche austro-russe. A la bataille d’Austerlitz il y avait 160 000 hommes et elle durait plus de 10 heures. La bataille d’aujourd’hui est livrée par 3800 reconstiteurs et se terminera dans 90 minutes. Pourtant il s’agit d’un événement de reconstitution unique. Les organisateurs espčrent que cet événement sera une inspiration pour préparer des événements commémoratifs semblables. Austerlitz c’est la premičre grande bataille des guerres napoléoniennes. Dans les 15 ans qui vont suivre on aura beaucoup d‘occasions de se commémorer cette épopée de l’histoire européenne ŕ la fois tragique, fascinante et importante.